Les troubles du voisinage

Jules, exploitant agricole, est interpellé par ses nouveaux voisins venant d’acheter la propriété accolée à sa pâture. Ils se plaignent de la présence de mouches et de l’odeur des vaches, Que risque-t-il ?

Chant du coq, tintement de cloches, odeur de fumiers, présence de mouches, tant de situations qui font partie intégrante de la vie rurale. Elles peuvent être vécus comme des troubles du voisinage par les citadins venus s’installer à la campagne. Le contentieux en la matière ne manque pas de défrayer les médias (Le coq Maurice).

Que sont les troubles anormaux du voisinage ? La notion de trouble anormal de voisinage n’est pas définie clairement par une loi, elle est une création jurisprudentielle reposant sur le principe « nul ne peut causer à autrui un trouble anormal du voisinage ».

Le trouble de voisinage est constitué dès lors qu’il est « anormal », c’est-à-dire lorsque son impact excède un certain seuil de tolérance pour toute personne « normale », que les voisins n’ont pas l’habitude de subir dans un lieu donné et à une époque donnée.

Les tribunaux apprécient souverainement les troubles en fonction des circonstances de temps et de lieu, de la limite de la normalité et de leur gravité. Les troubles doivent excéder les inconvénients raisonnables du voisinage.

Lorsque les inconvénients du voisinage sont jugés anormaux, Ils obligent l’auteur du trouble à dédommager la victime, quand bien même ce trouble serait inhérent à une activité licite et qu’aucune faute ne pourrait être reprochée à celui qui le cause, seule l’intensité de la gêne causée est prise en compte.

Pour obtenir réparation, la victime du trouble doit prouver un préjudice et établir l’existence d’un lien de causalité avec l’activité voisine.

Cependant, il existe une exonération à l’obligation de réparation reconnue notamment pour les activités agricoles par l’article L 112-16 du Code de la construction et de l’habitation. L’exploitant pourra invoquer l’antériorité de son activité à condition que l’installation des plaignants soient postérieur à l’activité litigieuse, que l’activité respecte les dispositions législatives et réglementaires en vigueur et se poursuive dans les mêmes conditions (même nombre d’animaux).

La loi du 29 janvier 2021 vise à définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises. Elle consacre les « sons et odeurs » qui caractérisent les milieux naturels comme composantes du patrimoine commun de la nation. Cette mention devrait permettre de prendre davantage conscience de leur valeur et de leur importance pour l’identité des espaces naturels. Les services régionaux se voient confier l’inventaire du patrimoine culturel, la mission d’étudier et de qualifier l’identité culturelle des territoires.

Cette reconnaissance légale du patrimoine sensoriel des campagnes devrait rendre plus difficile la mise en œuvre du principe du trouble anormal de voisinage.

Jules pourra faire valoir auprès de ses voisins que son activité est une activité rurale normale dans un village de campagne et qu’elle n’excède pas les troubles normaux de voisinage. De plus, il pourra faire valoir l’antériorité de son activité d’élevage.

Caroline Prévost 
Caroline Prévost 

caroline.prevost@fdsea80.fr
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